vendredi 7 novembre 2014

On ferme...

Apu
Apu.
Ben oui. Comme ça, c'est dit, c'est plié.
Cela fait déjà un bon paquet de temps que la question se posait pour moi de savoir si l'énergie déployée dans ce combat servait effectivement à quelque chose.

La lutte contre la réforme des rythmes scolaires a fini par avoir raison de moi. J'ai atteint la limite de ce que je peux consacrer à une cause. Le moteur est fatigué, l'embrayage patine, ça couine de partout, bref : je me sens plutôt sur le chemin de la casse que sur l'autoroute des vacances.

Explications.

La réforme des rythmes scolaires, c'est d'abord et avant toute chose une mesure imposée par le gouvernement Hollande 1. Certains croient encore aujourd'hui qu'une loi a été votée pour mettre en place ce machin : c'est faux. Un décret a été pris, ce qui laisse mesurer la dose effective de processus démocratique utilisée dans la fabrication de ce machin.

Pour illustrer le propos, sachez mes chers petits que dans des temps reculés, où l'on battait monnaie un peu partout, il fallait faire tinter les pièces pour savoir si elles étaient de bon aloi (c'est-à-dire si elles contenaient une quantité suffisante de métal précieux pour correspondre à leur "valeur faciale", ou si c'était du toc).
Trébuchet pour les sous
Trébuchet pour faux monnayeur
(bye bye...)
C'était avant la généralisation de la balance de type trébuchet (d'où l'expression "monnaie sonnante et trébuchante", et paf une couche de culture, c'est gratos ne me remerciez pas, j'aime me la péter, c'est ainsi), c'était rustique, mais à peu près efficace.




Procédons de même avec cette réforme. On la cogne, ça fait PLOOOONG. En clair, c'est creux.

Diplomate, ouais,
mais faut pas pousser.
Depuis des mois et des mois, ma moitié était fortement impliquée dans cette bataille et le faisait savoir avec son propre tempérament, qui n'est pas le mien.
Par déformation professionnelle sans doute, et aussi parce que j'ai subi plus d'une fois de cuisants revers en mettant peu de gant pour dire le fond de ma pensée à mes interlocuteurs, je suis devenu avec le temps de plus en plus diplomate.

J'ai donc fait mon œuvre habituelle de "nègre" littéraire en devenant sa plume. Puis, le temps passant et son rôle devenant de plus en plus majeur, j'ai fini par m'impliquer nommément et tomber le masque.



J'ai manifesté. Chanté des slogans. Ecrit des tracts, des communiqués de presse.
Je stratégise à donf.


Et surtout, j'ai tenté de réfléchir à des stratégies pour faire bouger les lignes entre le moutonisme national de tous ceux qui étaient concernés par cette réforme, qui allaient en baver et qui ne bougeaient pas une oreille (en mode "de toute façon qu'est-ce qu'on peut faire ?"), et le révolution-point-comisme des protestataires inscrits sur Facebook se foutant des peignées virtuelles les uns les autres à longueur de commentaires.


Résultat : échec et échec.
Il faut plus de temps et d'énergie que ce dont je dispose pour titiller la conscience des foules, leur faire réaliser que des décennies d'éducation à un comportement de suiveur pèsent sur leurs têtes et qu'ils doivent s'émanciper du défaitisme ordinaire.
Débat ordinaire sur Facebook
(allégorie)
De même, malgré un nombre conséquent de tentatives de médiation et d'apaisement, la guerre des ego fait toujours rage sur les groupes de discussion où, selon la formule désormais consacrée, les gens écrivent comme ils pensent, c'est à dire sans filtre, et perdent plus de temps à débattre de untel ou unetelle et ses potentielles intentions cachées de dominer le collectif des protestataires plutôt qu'à réfléchir à enrôler des amis dans la bataille.

Et là, moi, ben j'ai plus de courage.
J'ai des chantiers à finir dans ma maison, je n'ai pas écrit une ligne depuis plus de 4 ans, j'ai laissé tomber trop de choses et me suis tellement laissé bouffer que je ne suis plus que l'ombre de moi-même.

Devine qui va te bouffer ce soir ?
De plus, au risque de jouer les Cassandres, force est d'admettre que mon premier sentiment sur ce combat s'avère aujourd'hui concrétisé : les français dans leur immense majorité sont trop mous pour se battre, attendant tous que quelqu'un d'autre prenne en charge le problème, et lorsque le couperet tombe avec toute la force de l'appareil d'état pour s'assurer qu'aucune tête ne dépasse, on n'entend plus beaucoup de voix pour gueuler au scandale et pour continuer à dire que personne n'a demandé ce merdier.


En résumé, au lieu de se plaindre qu'ils se font écraser la gueule à coups de botte, ils se disputent au sujet de la pointure.


Bonjour les enfants, je suis votre
nouveau nouveau nouveau ministre...
Perspectives ? Là encore, je prophétise, et je souhaite me tromper : d'ici un ou deux ans, un nouveau gouvernement viendra constater la catastrophe financière et le ratage de cible, ficellera à l'arrache une nouvelle réforme qui sera elle aussi "concertée" --notez bien la différence de terme : concerter, c'est se mettre d'accord alors qu'on est sur la même longueur d'onde, alors que négocier, c'est résoudre une dispute en y mettant chacun du sien--, l'école publique subira de nouveau une onde de choc qui verra de nouveau les syndicats prendre chacun leur initiative de protestation dans son coin sans chercher l'efficacité de l'union, et le cirque recommencera son numéro.

Oui, je suis défaitiste.


L'année écoulée me certifie que j'ai raison de l'être : ce combat est perdu, en tout cas sous cette forme. Quand on se bat quasiment seul (ce qui est notre cas dans l'Ile de France, avec 1000 inscrits au groupe Facebook contre la réforme, et même pas 60 personnes qui se déclarent prêtes à venir manifester sur Paname), quand on est isolé jusque dans sa propre ville (ce qui est notre cas à Sannois, où un total mirifique de 4 personnes sur 27 000 habitants ont un jour porté un gilet jaune), ben au bout d'un moment on raccroche son épée au ratelier et on retourne cultiver son champ.
Déprimuri te salutant

Les petites victoires obtenues au tribunal administratif n'ont pas suffi à faire péter cette immondice.



Le Conseil d'Etat, muselé et aux ordres, qui délibère en 1/2 journée sur Dieudonné et n'a toujours pas répondu après 2 ans à Christian Schoettl, ne sera sans doute pas l'instrument de la délivrance attendue.




Je terminerai sur une note négative puis une note positive.

D'abord un extrait d'une chanson qui me parle à chaque fois qu'on me dit "naaaan, je peux pas manifester, j'ai piscine, et pis d'abord faut être adulte, hein, la réforme elle est là, faut faire avec" :
Renaud, "Hexagone" (1975)
"Ils font la fête au mois d'juillet,
En souv'nir d'une révolution,
Qui n'a jamais éliminé
La misère et l'exploitation,
Ils s'abreuvent de bals populaires,
D'feux d'artifice et de flonflons,
Ils pensent oublier dans la bière
Qu'ils sont gouvernés comme des pions"

Quant à la note positive, en forme de "coming-out" politique pour les quelques obscurs qui n'auraient pas encore compris vers quel bord mon cœur balance ces temps-ci, il y a un truc qui s'appelle "Le mouvement pour la 6ème République", qui est porté par Jean-Luc Mélenchon entre autres, qui appelle à une assemblée constituante (une vraie, hein, pas un faux machin façon Assemblée + Sénat à Versailles pour faire plaisir à Sarko comme à l'époque).



Je souscris à cette démarche, et je vous invite à vous en faire une idée et à y souscrire à votre tour.
Si vous voulez savoir pourquoi un type comme moi trouve une résonance dans ce mouvement, si vous voulez savoir pourquoi je pense par exemple que le PS est aussi à gauche que je suis papabile, contactez-moi, on causera, ça sera cool.


Ca se passe ici : http://www.m6r.fr



Merci à celles et ceux qui luttent encore, qui poursuivent et remportent des victoires (bien souvent en province, tant pis pour Paris qui a décidément du mal à bouger son gros boule), et qui gardent le souci des enfants des autres dans ce combat. Désolé de vous lâcher, moi, j'en peux plus. Bon courage et à bientôt (sur les barricades, si tout continue comme aujourd'hui).
--G4rF--

mardi 30 septembre 2014

Cher(e) dirlo

Lis tes ratures
Lis tes ratures !


J'ai pris la plume ce soir pour exprimer à la direction académique du Val d'Oise ce que je pense, à la fois de la réforme des rythmes scolaires, mais aussi de la farce grotesque dont peu de parents d'élèves de l'élémentaire ont encore pris conscience : les 4 demi-journées de "concertation" sur les nouveaux programmes.




Ce n'est qu'un mauvais moment à passer
Ce n'est qu'un mauvais
moment à passer... hé hé !

C'est rigolo d'une façon très ministérielle et très contemporaine parce que le même ministère qui fait chier son monde pour obliger les écoles à ouvrir le mercredi matin demande finalement de les fermer 4 fois de suite cette année, pour faire --à mon humble avis-- semblant de débattre avec les profs des nouveaux programmes (lesquels sont aussi négociables par un prof lambda que le fait de baisser son froc peut l'être en allant chez le proctologue).

Et ça, donc, à la place de quelques-unes de ces précieuses heures d'enseignement du mercredi matin, obligatoires mais pas trop si je comprends tout bien (j'ai des doutes là-dessus).


"J'ai rien à voir avec ça, moi !"
"J'ai rien à voir
avec ça, moi !"


Parce que voilà comment ça se passe : ton gosse est crevé, tu trouves cette réforme débile (ce qui signifie que tu as l'oeil, camarade lecteur), tu boycottes le mercredi matin, et paf ! Tu te chopes une lettre de menace de l'académie, où on t'annonce que tu vas te prendre des sanctions pénales, des amendes, un vigoureux fouettage en place publique avec des orties fraîches, et même si tu récidives un concert privé acoustique des faces B de Benjamin Biolay.
Si.





Je t'appellerai Coup Critique, mon amour !
Je t'appellerai Coup Critique,
mon amour !



Mais si c'est l'acacadémimie qui veut récupérer son mercredi pour sa propagande interne concertation, là, elle a le droit. Bin oui, j'ai 2 D20* de bonus en filoutage administratif, et j'ai 8 points de compétence en ferme-ta-gueule-citoyen.


Pendant ce temps-là, kékifé ton gosse, hmm ? Y'a plus de centre de loisirs, le ministère l'a fait fermer le mercredi matin depuis qu'il y a école !


Par chez nous, le maire a (pour une fois) pris ce que j'estime être la bonne décision : dire merde à l'académie et ne pas ouvrir les accueils de loisirs. Il pourrait faire encore mieux : ouvrir les écoles, pour qu'on puisse nous aussi y aller faire mumuse, taper le ballon dans la cour avec les gosses pendant que leurs instits s'emmerdent dans une quelconque réunion pourrave d'un bâtiment administratif sinistre d'une banlieue éloignée au mètre carré de béton abordable... Ca aurait de la gueule !

Mais bon, je cause, je cause, et j'oublie de vous assommer avec ma prose épistolaire. La voici :



--G4rF--

*si vous n'êtes pas rôliste, ça ne vous dira rien. Et c'est bien dommage... pour vous ! Vous passez à côté d'un monde sympa (quoi qu'envahi d'ados boutonneux).

jeudi 18 septembre 2014

Comme des pions

Dur, dur de se pousser aux fesses pour faire avancer le combat dans l'atmosphère ambiante.
Les ministres filent,
les galériens défilent

C'est là que l'on mesure le coût qu'engendre une bataille dans laquelle on sait qu'il faudrait des forces massives pour l'emporter très rapidement, mais où l'on constate assez vite qu'on est isolés malgré nous, au milieu de la masse des "on n'y peut rien", "à quoi ça sert de se battre", et j'en passe.


11 septembre : commémoration
de la connerie
J'évoquais dans un billet précédent l'espoir que je plaçais dans la confrontation au tribunal administratif entre le préfet de l'Essonne et le maire de Janvry, précurseur de la lutte contre la réforme des rythmes scolaires.
Aussi incroyablement stupide que ça puisse être, le tribunal a donné raison au préfet.

Décidément, le 11 septembre, c'est vraiment une journée pourrie.

Je retire donc ce que j'ai dit : le droit, c'est pas fun.

En synthèse, on peut dire que le tribunal s'appuie sur la décision rendue par le Conseil d'Etat ce 2 juillet, suite à un recours contre le décret Peillon/Hamon déposé par une asso de parents, auquel a été associé le recours déposé par Sud Education.
Jurisprudence power.
Mais, et c'est là que le bât blesse, la décision en question est, en tout état de cause, entachée d'erreur. Je cite le paragraphe qui me fait bondir :
Solide, sûr, élégant :
un argumentaire qui tient la route !
13. Considérant, en deuxième lieu, que, dès lors, ainsi qu’il a été dit au point 3, que le décret attaqué ne crée pas une obligation pour les collectivités territoriales d’organiser des activités périscolaires complétant la journée de travail des élèves, les moyens tirés de ce que cette obligation méconnaîtrait le principe constitutionnel d’égalité, le principe d’indivisibilité de la République française et le principe de libre administration des collectivités territoriales ne peuvent qu’être rejetés ; que les moyens tirés du défaut de clarté, d’accessibilité et d’intelligibilité soulevés par l’association requérante sont également dirigés contre les dispositions du décret, qui créerait une telle obligation, et ne peuvent également qu’être rejetés ; 


S'il est inévitable de constater que le décret original et sa version hamonisée ne font pas mention explicitement d'une obligation d'organiser des activités périscolaires, il faut remettre les choses dans leur contexte d'application : en déplaçant du temps scolaire sur une demi-journée de plus, la réforme crée des trous, et aucun financement n'est prévu pour que les communes puissent "boucher" ces trous avec le minimum requis (c'est à dire de la garderie).
Financement de la réforme (allégorie)

En effet, le fonds d'amorçage n'est là que pour démarrer la mise en place d'activités périscolaires, et donc si t'en fais pas, t'as rien.

Conclusion : la réforme crée bel et bien de nouvelles dépenses pour les communes, qui sont contraintes d'ouvrir les écoles une demi-journée de plus par semaine (ça coûte du fric : de l'eau, de l'électricité, du nettoyage, de la maintenance) et de prendre à leurs charges les mômes pendant les trous d'emploi du temps créés.
Et si les communes ne peuvent pas ou ne veulent pas mettre de TAP, c'est zéro thune et tu fermes ta gueule.
C'est donc du marche ou crève, et si ça c'est pas se torcher avec le principe de libre administration des communes, je ne sais pas comment l'appeler.

De là, que faire ?

Déjà, se rappeler qu'il y a des éléments positifs.
Et d'une, maintenant que toute la France a les deux pieds dans la merde réforme, on constate un regain d'intérêt pour ce sujet.
Nous avons lancé un petit sondage (3 minutes pour répondre) destiné à ceux qui subissent directement l'effet de la réforme : en moins de 3 semaines, nous avons reçu 3200 réponses, et le bilan est sans appel :

Et de deux : il est encore possible de faire tomber cette grossière connerie et de se retrousser les manches pour bâtir un système éducatif qui ne marche pas sur la tête.

Maman, je peux écrire un autre
décret avant de passer à table ?
Steuplééééééééé !
Rappelons à cet effet --merci l'arrêt du Conseil d'Etat qui le rappelle à sa façon-- que, puisqu'apparemment l'organisation de la semaine scolaire relève de la prérogative du directeur académique, puisque celui-ci est semble-t-il choisi pour sa capacité à plier l'échine face à l'incurie de sa hiérarchie, puisque celle-ci a le pouvoir de tremper sa plume dans l'encre inbile pour rédiger un décret qui dit "demain, il y aura cours de 4h du matin à 6h03, puis récré pendant 8h47 et reprise des cours jusqu'au coucher du soleil"... hé ben ladite hiérarchie peut aussi dire "oh, té, les mecs, on s'est complètement gourrés avé cette réforme de mes cougourdes, alors on va embrasser Fanny, et après on se met à table pour l'apéro et pour parler un peu sérieusement d'école et de ce qu'il faut faire pour qu'elle remarche, cong !".

Ça, c'est le pouvoir du ministère, apparemment. Je repose donc la question : qu'attend donc la ministre pour user de son pouvoir (dans un sens non imbécile, cela va sans dire) ?

Machine à réformer l'école
(fonctionne à l'eau tiède)

Que s'empilent de plus en plus les témoignages de dysfonctionnement de cet épouvantable bouzin ?





Aujourd'hui, on tond le berger !

Que les gentils moutons, dressés à la docilité et au "c'est leur problème" réalisent qu'on les mène droit dans le mur et qu'ils cessent de se laisser berner ?



Chuck Norris dit :
les jeux sont faits




Que ceux qu'on gouverne comme des pions se réapproprient leur pouvoir, fassent les fous, montent dans les tours et sur leurs grands chevaux pour faire échec au petit roi ?






Certes, les français sont mous, probablement parce qu'on leur hache leur steack au lieu de les contraindre à aller le chasser. Société des loisirs, chacun sur son quant-à-soi, plus personne pour se révolter, plus personne pour manifester... jusqu'au jour où ça pète. La réforme des rythmes scolaires, c'est une étincelle de plus qui tombe en plein dans la Sainte-Barbe.

Mâche ta brique !
Pour être parfaitement franc, et livrer mon point de vue personnel, je ne peux imaginer qu'un pays tout entier, gouverné par une caste détachée de la réalité et qui n'a plus qu'un vague rapport avec le bas peuple et ses turpitudes, accepte encore bien longtemps de se bouffer le mur et d'être contraint d'en mâcher les briques.
Quand ça va péter --et ça va péter, on en est sûr, on se demande juste quand-- la violence des représailles sera, j'en suis persuadé, proportionnelle à la taille des couleuvres qu'on aura contraint les petites gens à avaler.

Et moi, j'écris ça assis peinard devant le clavier, avec un salaire correct qui tombe chaque mois et une dose de difficultés somme toute modeste à affronter. Moi, qui suis techniquement plutôt à l'abri de la galère et loin de la misère, j'en ressens les chocs dans mon modeste séant.
Je veux pas trop faire mon Dickens, mais imaginez ce que pensent et veulent faire à leurs bourreaux quotidiens ceux qui ont moins de chance que moi...
(J. Tardi)
--G4rF--

mardi 9 septembre 2014

Le droit, c'est fun ! Mais si !

Attendu que MDR,
le tribunal décide que LOL
Si, si, je vous assure, le droit, c'est rigolo.
Enfin, ça peut l'être.

J'en parle en (légère) connaissance de cause puisque mes tribulations passées m'ont déjà amené à être confronté à la mécanique particulière du droit administratif, et quand on en apprécie les finesses, il y a certains moments de pure joie et d'anticipation.
J'étais, moi aussi, du mauvais côté du bâton. Si je dis "moi aussi", c'est parce qu'un petit phénomène intéressant se passe en ce moment avec les assignations en référé qui se multiplient contre les élus opposés à la réforme, et qui ont entamé des actions en ce sens.

Je dis intéressant car les derniers jugements rendus ont été favorables à notre lutte. Cool !

Commençons par la
commencitude

Mais reprenons au début.


En France, les tribunaux évaluent l'application du droit dans une situation donnée, entre un plaignant et un défendeur généralement.
Le droit, c'est tout le paquet de lois, décrets, règlements & compagnie, plus les grands principes qui les chapeautent (la constitution notamment), plus les cas précédents où il a fallu trancher des problèmes d'application du droit (la jurisprudence).

Comme c'est un gros foutoir qui va chercher très très loin dans la spécialisation (ce qui laisse bien songeur quant à la possibilité effective de mettre en oeuvre le principe fondamental qu'on a tous lu ou entendu : "nul n'est censé ignorer la loi"), ça fonctionne un peu comme une commode.

Chaque chose à sa place,
de préférence sous clé
Y'a un tiroir pour les chaussettes (le droit pénal), un tiroir pour les caleçons (le droit civil), un pour les sex-toys accessoires (le droit administratif), etc...
Et dans chaque tiroir, y'a des boîtes, et ces espèces de "sous-droit" dérogent au droit parent en apportant des particularités propres à leurs champs d'application spécifiques.

Ca éveille l'intérêt quand on sait que la justice administrative a tendance à trancher en faveur de la continuité d'action de l'appareil administratif, et qu'elle s'appuie à mort sur la jurisprudence des cas similaires à celui qu'elle doit juger.

Evidemment, c'est rédigé dans le sabir spécifique que l'on retrouve sous diverses formes dans les professions à jargon (avocat / médecin / technicien / etc.), mais on s'y retrouve quand même.

Une p'tite cahouète pour
ouvrir l'appétit

Je vous la refais avec mes mots à moi.

Mise en appétit :

- le préfet de l'Essonne a (sur ordre du ministère) attaqué par le passé la première délibération du conseil municipal de Janvry contre l'application de cette réforme ;
- 3 jours avant l'audience, le préfet a laissé tomber (c'était en Novembre 2013) ;



Recette de base

Le gâteau :
- aujourd'hui, toujours téléguidé parce que c'est le job qui veut ça, le préfet remet le couvert, et en référé s'il vous plaît, accusant la mairie de Janvry de n'avoir informé les parents que par un courrier fin Août du maintien des horaires pré-réforme ;
- manque de pot, les avocats rappellent que le préfet a déjà tenté le coup de l'attaque contre Janvry et s'est déballonné ;
- ils signalent que la dernière délibération du conseil municipal, qui acte l'impossibilité (même avec les assouplissements et tout le tintouin) d'appliquer correctement la réforme avec les moyens disponibles, a été prise le 3 juin 2014, et transmise pour contrôle à la préfecture 2 jours après ;
- or la loi prévoit que la préfecture dispose de 2 mois à compter de la date de réception pour statuer sur la légalité : en clair, si le préfet ne dit rien pendant 2 mois, la délibération est entérinée de fait. Et nous sommes en septembre...
- les avocats envoient donc balader le préfet et sa requête mal ciblée (attaquer le courrier aux parents en "oubliant" la délibération du conseil), et en profitent pour signaler que pour l'astreinte de 1000 euros par jour de retard dans l'application de la réforme, faut quand même pas pousser le dromadaire dans les cactus (je traduis, hein !) ;

Recette de base,
plus option
Le fourrage à la crème pâtissière :
- le préfet dit que la délibération entraîne le non-respect de l'accès égal des enfants de Janvry à l'école par rapport aux mômes d'autres villes ;
- les avocats indiquent que, puisque les horaires d'ouverture des écoles prévoient toujours autant d'heures de cours, c'est du flan cet argument ; d'ailleurs, ils précisent que le tribunal de Rouen vient d'affirmer ce principe en déboutant l'état qui attaquait la commune de Ganzeville le 6/09, de même que le tribunal de Toulon vis-à-vis de Montmeyan le 5/09. Pan dans les dents ;


Toutes options
Les p'tits fruits en bonus :
- le préfet dit que la délibération ne respecte pas le décret de la réforme (bah oui, quand même) ;
- les avocats signalent que ledit décret est illégal, car il ne fournit pas les moyens d'appliquer la réforme. Ils rappellent que la loi dit que cette fourniture de moyens s'apprécie au moment de la mise en oeuvre du transfert de responsabilité entre l'Etat et la commune, qui est contrainte par la réforme à mettre en place des activités périscolaires ou de la garderie supplémentaire, de recruter du personnel... Donc, décret illégal au titre de la constitution (article 72-2), et donc on ne peut pas reprocher à une ville de ne pas respecter une disposition d'état qui elle-même s'essuie les pompes sur la constitution et la jurisprudence ;

Série limitée DeLuxe
Le glaçage :

- les avocats rappellent que toutes ces nouvelles dépenses viennent flanquer le dawa dans les budgets des communes. Or (pas de bol), la jurisprudence du Conseil d'Etat sur un cas similaire (Villeurbanne, mai 96) établit que mettre la pagaille dans les finances d'une ville, c'est se moucher avec le même article de la constitution (libre-administration des communes). Donc, décret illégal par ce biais-là aussi ;


Modèle excessif
La cerise sur le McDo :

- les avocats soulignent qu'un décret, ça doit être totalement explicite et ne rien cacher de ses conséquences ("principe constitutionnel de clarté et des objectifs de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la norme", je cite).

Or, le décret Peillon/Hamon oublie joyeusement d'évoquer les transferts de responsabilités, donc n'est pas explicite, donc est illégal une fois de plus par cet axe-là. Paf ;




Modèle ultime :
obscène
mais savoureux
La touche finale :
- le préfet réclame que le tribunal, saisi en référé (une procédure d'urgence), fasse sauter la décision de maintenir les horaires pré-réforme ;
- les avocats signalent qu'en décidant ça, le tribunal outrepasserait son domaine de travail, qui est de prendre des décisions provisoires, pas de faire dans le définitif (car ça, c'est le boulot d'un tribunal saisi normalement, et pas en référé).
Conclusion : si le tribunal suit la demande du préfet, ça donne matière à attaquer le jugement parce qu'irrespectueux du droit.
Et si un tribunal se met à interpréter à sa guise les frontières du terrain sur lequel il influe, il a environ 100% de chances de se faire atomiser par la juridiction supérieure, ce qui fait tâche sur le C.V. du juge qui veut prendre du galon et quitter les prétoires bas de gamme pour les ors et le velours des corps d'élite judiciaires.

Go ahead, make my day
Moi, en lisant tout ça, j'ai bien ricané sous cape.
J'ai compris aujourd'hui (peut-être de travers) que le jugement avait été renvoyé parce que de nouvelles pièces avaient été versées au dossier par les avocats de Janvry (j'imagine que ce sont les jugements de Rouen et Toulouse), et que ça va se juger très bientôt.


Si malgré tout ça le tribunal donne droit aux demandes du préfet de l'Essonne, va falloir qu'il fignole un argumentaire très très très précis, parce que les suites vont être sportives.



M'enfin, tout ça pour quoi, hein... pour régler un problème que Peillon ou Hamon auraient pu dégonfler en 3 minutes s'ils avaient accepté de nous recevoir, en se comportant comme des ministres autonomes et aptes à agir par eux-mêmes, plutôt qu'en la jouant fonceur bourrin sur des rails inamovibles (et en finissant dans le mur).
Najat Vallaud-Belkacem et moi, on a quasiment le même âge, ai-je remarqué. Si cette femme a eu l'occasion de se frotter un peu à la vie (et je pense que c'est le cas, quand on arrive à cet âge), elle a dû développer un peu d'intelligence pratique.


La mécanique de la comprenette
(par Jean-Kévin Da Vinci,
6 ans)
Et partant de là, le constat est fort simple : Peillon s'est banané, Hamon s'est fait sortir, et Najat Vallaud-Belkacem récupère un ministère déglingué avec une réforme de merde dans un pays en crise sous le gouvernement le plus détesté que j'aie vu de ma petite vie.

D'un point de vue purement pratique, qu'est-ce que ça pourrait bien lui coûter d'ouvrir sa porte et ses esgourdes aux opposants à la réforme (mais elle-même, hein, plutôt que d'envoyer des larbins), et de donner enfin dans le pragmatique pour essayer de remettre le navire à flot ?

Pour peu qu'elle le fasse avec sincérité, elle passerait pour une courageuse, une réaliste, une politicienne en pleine possession de ses dossiers. Pas mal, sur un C.V., ça, non ? J'irai pas jusqu'à dire qu'elle me rendrait confiance dans le P.S. --on ne demande pas à un crocodile d'aimer les maroquiniers-- mais ça ferait d'elle en un tournemain la plus sympathique de tous nos gouvernants. Le genre avec lequel on ne s'interdit pas de négocier. Le genre qui a de l'aplomb, de l'envergure, qu'on écoute, parce que sa parole, ce n'est pas que du vent. Par les temps qui courent, c'est très très rare, ça.
Quoi qu'il en soit, la balle est dans le camp de la justice pour l'instant. Mais Najat a le pouvoir de siffler la fin du match, alors qu'attend-elle pour s'en servir ?

--G4rF--

lundi 8 septembre 2014

Pirouette dans le caniveau

Aesculus hippocastanum,
également appelé marronnier
chez les plumitifs de bas niveau
Une nouvelle année scolaire débute.

Dans un élan commun puissant de grégarisme, avec ce bel ensemble dans le mouvement qu'acquiert la troupe soldatesque rompue depuis des années à la discipline, les medias dominants se jettent sur tout ce qui a trait à la scolarité comme la vérole sur le bas-clergé.


Nouvelle année scolaire, nouvelle année de luttes : depuis janvier 2013, la réforme dite des "rythmes scolaires" occupe mon temps personnel et de loisir bien plus que je ne l'aurai cru possible.
De manifs en manifs, de débats en débats, depuis les groupes de discussion du zéro réseau social par excellence* où s'écharpent gaillardement tout un tas de gens a priori pas plus bêtes que la moyenne pour une virgule mal placée ou pour s'être laissé piéger à écrire comme ils pensent (c'est à dire sans filtre), je bouffe Peillon, je mâche Hamon et maintenant je déglutis Vallaud-Belkacem.
Une tête de mort au guide
des réformes indigeste : à éviter
Autant le dire en deux mots : le cuistot change, mais le plat est toujours aussi immangeable.

Samedi 6 septembre 2014, 15h00.

Nous arrivons place Colette à Paris en déambulant sur l'avenue de l'Opéra depuis le métro Pyramides. Au lieu du départ de la manifestation, un attroupement et plusieurs écharpes tricolores.
Cette nouvelle manifestation, la première de la nouvelle année scolaire, est à l'initiative des élus opposés à la réforme.
Par l'effet du grégarisme cité plus haut, une petite nuée de caméras et de micros tournicote autour des dromadaires de Christian Schoettl, en attendant une déclaration de Nicolas Dupont-Aignan.

Nous déployons nos 6 mètres de banderole. Abordés par un mec à l'haleine houblonnée, nous expliquons le pourquoi de la manif. Il acquiesce et discute un peu. Pour un type imprégné en mode Ernest Déhaif, il paraît assez lucide.
Galoche citoyenne (allégorie)
J'ai confirmation quelques instants après de sa lucidité en peignant à grands traits le tableau noir de la réforme devant des dames qui confessent assez vite avoir défilé contre le mariage gay. Je me fais un plaisir de glisser qu'on pourrait me qualifier d'extrême-gauche (grimace à demi terrifiée mais pas vraiment convaincue : quoi, ce gentil papa avec sa fille dans les bras et l'autre dans sa poussette, un horrible gaucho au couteau entre les dents ?). Ces dames sont moins bourrées que le mec d'avant, mais elles confondent leur débat moraliste avec notre lutte argumentée... tant pis.

"On est avec vous", entendons-nous de gauche et de droite. C'est mieux que "démerdez-vous", mais c'est quand même pas Byzance. Le cortège s'ébranle. Nous marchons longuement. Nous crions fort, mais toujours la même chanson : personne n'a pensé à emmener les paroles des chansons anti-réforme. Bravo les devoirs de vacances !
Traversée du Louvre. Traversée de la Seine. On enfile les petites rues trop étroites pour la banderole, mais où ça résonne bien quand je hurle "ABROGATION !" à m'en faire péter les poumons.

Commerçant inquiet
qui pense
tout haut
(illustration)
Marcher, marcher, chanter, chanter. Par ci par là, les regards mi-inquiets mi-curieux des commerçants des beaux quartiers : ils en font du bruit, pourvu qu'ils pètent pas ma vitrine, mais pourquoi ils sont en jaune, c'est des éboueurs ou quoi... On les entend presque penser. Ou bien je me fais des idées...

Le boulevard Saint Germain se profile, on s'assied par terre un instant sous le nez des z'automobilistes qui n'en demandaient sûrement pas tant. Paniquée, la nénette qui a déposé la déclaration de manif et qui s'est tellement pomponnée pour se montrer aux caméras qu'elle pourrait passer pour un infomercial de Maybelline s'agite : "dépêchez vous, on va rater l'audience au ministère !
- Pfff, ils ne nous recevront jamais.
- Mais si, mais si !
- Ben tiens..."

"Ceci n'est pas un cordon de bleus"
(R. Magritte)
Debout, on repart après deux minutes au sol. A droite, rue de Grenelle. On marche. Bientôt l'arrivée au barrage devant le ministère si tout se passe comme d'hab. Manque de pot, au croisement avec Raspail, la rue de Grenelle est bloquée par un cordon de bleus.

Volte soudaine des dromadaires, on ne comprend pas, ça proteste : déjà qu'au début, on devait aller vers l'Elysée, puis vers Matignon, et là finalement on n'arrive même pas au ministère de l'(in)éducation nationale ? Mais c'est quoi, ce gros bordel ?
Remue-ménage citoyen, ah les bâtards, tellement dégonflés qu'ils nous refusent le droit d'aller gueuler sous leurs fenêtres. On suit la direction indiquée par les flics, plusieurs suggèrent de forcer le cordon, mais ça paraît dingue d'envisager un truc pareil alors que tant de mômes sont présents dans le défilé et vont subir du lacrymo si ça dégénère.
"Ceci est un cordon de bleus"
(C. Pasqua)
Métro rue du Bac, terminus du défilé. Sans les casques à la ceinture (bon signe), le cordon de bleus
s'étire avec régularité derrière les barrières, sous un soleil bienvenue et pas trop assommant. Nouvelle gueulante : putain, ils ont pas le droit, il faut forcer les barrages.

Sans vouloir me la péter, je pense que je suis devenu assez fort en manif. Trois individus en civil passent en file indienne à côté de moi, dont deux avec oreillettes. Je dis tout haut et bien fort : "et si on demandait ce qu'il se passe aux R.G. ?". La dernière personne de la file s'arrête, une fille dont la voix me parle : je pense qu'on l'a déjà eue au téléphone au sujet des manifs de 2013-2014.
Je le vaux bien ! Où est la caméra ?
Stupeur : nous apprenons que nous sommes bien sur le dernier trajet de manif déclaré, et qu'à part miss Makeup, personne dans le défilé n'était au courant du parcours.
Histoire d'apaiser un peu les esprits qui s'échauffent, je relaie l'info aux manifestants autour de moi.

Les mâchoires pendent, on est tous sur le cul. Makeup s'approche et me confirme que c'est bien ça qui a été convenu. Pas un mot pour déplorer le ratage de communication, pas une pensée pour tous les écoeurés du défilé qui ont envisagé très sérieusement le passage en force.
Sondeur officiel et totalement
impartial.
Tu penses, elle est bien trop obnubilée par la perspective de sa nouvelle visite au ministère, où (nous l'apprendrons plus tard) un nouveau sous-fifre a annoné fidèlement sa leçon pour mériter son susucre, à savoir "un-sondage-exclusif-CSA-a-montré-que-quatre-vingt-pour-cent-des-parents-approuvent-la-réforme". Bon toutou, avec un peu de pot, le
nouveau perroquet que Hollande a installé au perchoir ministériel te donnera des croquettes en plus.

Les animatrices qui défilent derrière nous regroupent les gosses et les asseyent par terre pour jouer. "Le facteur n'est pas passé..." et les gosses s'amusent, le boulevard Raspail est à eux tandis qu'on glande et qu'on s'emmerde en espérant --sans trop y croire, pour ma part, je reconnais une défaite quand j'en vois une--- que l'audience aboutira à quelque chose.

Un, deux, trois, soleil, les mômes sont énervés, fatigués, j'ai envie de m'asseoir et de pioncer, on s'esquive comme des voleurs pour aller se rafraîchir au bistrot de la rue du Bac, pas loin.

Déception, déception, déception.

Certes, c'était le premier week-end de l'année, et bien des élus et des intervenants associatifs et des parents étaient occupés par les inscriptions des gosses dans les divers forums.

Mais une fois de plus, nous payons le prix amer de la confiance mal placée en des personnes qui, j'en suis convaincue, vendraient père et mère pour avoir leur binette dans les gazettes ou à la tévé.

Et quid de la réforme, pendant ce temps-là ? Quel espace médiatique reste-t-il pour que des plumitifs courageux s'emparent de ce sujet complexe et en donnent une lecture qui ne soit pas déformée jusqu'à l'écoeurement par le poids malsain de la doxa gouvernementale ?
Bordel de merde, y a-t-il un journaliste dans la salle ? Un vrai, un qui bosse, qui sait additionner deux et deux ?
"Fair play"
(M. Friedman & co.)

Je remue de noires pensées en réintégrant lentement ma banlieue... Fatigué physiquement et moralement éreinté par ce nouvel écueil contre lequel notre volonté de faire exister le débat sur ce problème transverse à toute la société vient de se heurter, j'en viens à me dire que nous vivons dans un système bien particulier, un système qu'on pourrait appeler la démocratie capitaliste. Une voix par électeur, mais bizarrement, plus l'électeur est riche et influent, plus sa voix pèse et plus la tienne s'allège.

C'est ce qui permet à une minorité ignorante de la réalité de terrain d'imposer des mesures ratées et coûteuses. C'est ce qui permet à un appareil d'état d'ignorer l'existence d'un problème même quand on lui en apporte les preuves, et de pousser le vice jusqu'à poursuivre ceux qui laissent parler leur colère face à cette indigence intellectuelle verticalement imposée. C'est ce qui permet de préparer, petit à petit, un pays tout entier à accepter tout ce qu'on lui sert, sans se sentir concerné, parce que, voyez-vous, c'est leur problème**.

"Vous ne pensez pas qu'il y a plus grave, quand même ?
- Mais si, ma bonne dame, justement, c'est pour ça qu'on doit se bouger !"
(im)Patients
Car voyez-vous, quand vous allez aux urgences à l'hôpital pour qu'on vous prenne en charge après vous être cassé le bras en glissant sur une peau de banane, vous allez attendre avec des gens qui ont des petites coupures, des gens qui ont été ravagés par un accident de bagnole... petit bobo, gros bob, dans tous ces problèmes, il y en a de plus graves que d'autres, mais tous doivent être soignés : il n'y a pas de mal négligeable.

Est-il anormal de penser que les gouvernants d'un pays riche comme le nôtre puissent être en mesure de s'occuper de plusieurs problèmes de société à la fois ? A défaut de quoi, d'ailleurs, la justification de l'existence de multiples ministères serait difficile à établir, puisque s'il faut traiter un seul problème à la fois, on n'a peut être besoin que d'un seul ministre à la fois.
Et encore, faut voir les ministres...

Aujourd'hui, comme hier, gravons au fer à souder au plus profond de nos boîtes à synapses cet adage simplet mais tellement actuel : la citoyenneté ne s'use que lorsqu'on ne s'en sert pas. Comme disaient les poètes, c'est pas nous qui sommes à la rue, c'est la rue kétanou.

--G4rF--

*indice : ça commence par Face et ça finit par Book.
**relisez Matin brun, ça devrait éveiller un écho.